Ma visite de l'exposition d'Eric Corne "Being Beauteous" chez Patricia Dorfmann in Diary par Guy Tortosa (extrait) - Mars 2015
(…) la plus troublante de mes visites a été la plus tardive, ce fut à l’exposition Being Beauteous d’Eric Corne, galerie Patricia Dorfmann, où je suis arrivé alors que, la galerie étant déjà plongée dans le noir et la cour elle-même dans la pénombre, Patricia fermait à clef...
- rédigé par David Rosenberg (la rose de pierre ou la montagne rose ?), le communiqué fait référence à Cravan, « l'artiste-boxeur-provocateur », et au « fulgurant Nussbaum, à la fois expressionniste et allégorique »
- l’histoire d’Eric c'est aussi écrit Rosenberg « l'histoire d'un clown aux grands pieds (...), inadapté » qui peint avec des gants de boxe « comme on jouerait du violon les mains empêtrées. Ça rend les choses moins évidentes, mais aussi plus ardentes. D'où (...) le cousinage avec Guston, le Bad-painter »
- pour ma part, les « gros godillots à clous » me font aussi penser aux Pieds nickelés du palefrenier devenu jockey Louis Forton, l’un des pionniers français de la BD qui dut lui aussi faire usage de références anglo saxonnes, à commencer par ses premiers pseudonymes...
- Rosenberg écrit encore : « Pourquoi ses tableaux sont-ils importants ? D'abord, parce qu'ils sont singuliers. Aussi parce qu'ils sont lumineux, sombres, littéraires, cryptés, ensorcelants, parfois embarrassants. // La lumière l'obsède. Celle du soleil, de la lune, des bougies, des étoiles, de l'âtre... (...) deux astres font la course dans son ciel : Rimbaud et Van Gogh. [Ces deux noms apparaissent distinctement sur un panneau indicateur ou une sorte d’enseigne dans un petit tableau] // Nu, paysage, portrait, nature morte : toutes les questions posées par la peinture ou la poésie... // Brasser des mythes, dévorer l'histoire, aimer les corps, dépeindre l'âme : Corne à donc fort à faire et nous beaucoup à voir. // Démesuré et légèrement fou : devant ses toiles, on réfléchit au comment et au pourquoi de l'apparition d'une image, au grand brassage des mythes, au fait que l'art se nourrit de l'art mais pas uniquement. »
- comme je parle d’art narratif, Patricia répond « littéraire » et me dit qu’Eric ne sait pas par avance ce qu’il va peindre...
- je lui dis que ce que je vois me fait penser à la belle formule de Nelson Goodman : « manières de faire des mondes »
- cet aspect « historié » de ses peintures est ce qui « frappe » avec la lumière souvent crépusculaire ou de feu qu’on y trouve...
- le terme historié m’est venu naturellement or, son origine dans ma mémoire, n’est pas indifférente : elle remonte à mes études en histoire de l’art roman
- les femmes nues d’Eric Corne ont en effet quelque chose de certains corps figures désarticulés de certains chapiteaux et bas-reliefs comme celui de La Tentation d’Eve de Saint-Lazare d’Autun
- ils ont aussi la maladresse et parfois la raideur des nus du Douanier Rousseau et en tout premier lieu du Rêve
- j’ai dit aussi à Patricia que me touche le fait que grâce aux nombreux tubes de peinture écrasés qui jonchent le sol à l’avant du grand tableau (230 x 330 cm) qui donne son étrange titre à l’exposition et qui a été acheté par Antoine de Galbert, j’ai l’impression qu’Eric s’est réconcilié avec le modernisme présent dans les Figures (cf. Gorin, etc.), le modernisme inventé par Gauguin tenant un revolver sur la tempe de Seguin pour lui interdire l’usage de couleurs complémentaires suivis par Franck Stella (« Je cherche à garder la peinture aussi bonne que dans le pot », Jasper Johns (Painted bronze - Savarin -, 1960), Arman ou, pourquoi pas, Jean-Pierre Raynaud...
- pour autant, le cycle des peintures de paysage entamé par Eric depuis des années ne laisse pas d’intriguer par les obsessions qu’il y déploie et peut-être plus encore par la rugosité (sorte d’improbable « haptigkeit ») qu’on y trouve et qui semble venir d’un dialogue tant avec Van Gogh qu’avec Eugène Leroy...
- « ses dernières toiles, écrit encore David Rosenberg, sont de nobles combats, avec de beaux gestes comme on peut en voir sur un ring ou dans un stade. »
- il est clair qu’Eric a dû accepter en effet d’être vaincu avant de commencer à peindre les premiers des tableaux de cette série
- et cette manière d’accepter de perdre au jeu de l’art et de la vie est sans doute ce qui fait artistiquement « triompher »...
- je suis reparti pour m’engouffrer dans le métro à la station Hôtel de ville
- il était 19h00 passés, deux jours avant la nouvelle heure d’été
- le ciel était chargé de nuages et, avec l’Hôtel de ville et la cathédrale en enfilade, le paysage de Paris était à cette heure et à cet endroit magnifique (« beauteous » en somme) et inquiétant
- le ciel était en effet d’un bleu d’aquarium, lumineux et sombre à la fois, déclinant, moucheté d’anthracite
- dessous, éclairés par celle qu’on appelle la fée électricité et qui n’est autre peut-être que la sorcière du progrès, les monuments semblaient factices, voire kitsch, comme dans un tableau de Monsu Desiderio, Carzou, Bernard Buffet ou le Douanier Rousseau...
- peut-être que la Seine avait à cette heure pré nocturne la clarté d’oxymore que l’on voit aux pieds des falaises et des îles (île des morts, de Vassivière ou de Shutter Island ?...) dans les tableaux crépusculaires d’Eric
- le lendemain, je pensais par deux fois au grand tableau de l’exposition en lisant des poèmes placés à la fin d’une édition du Gai savoir de Nietzsche traduite par Alexandre Vialatte et en m’arrêtant à l’évocation d’un « paysage crépusculaire » faite Etty Hillesum dans une lettre datée d’un « dimanche » de 1941 vers « onze heures » du matin...
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Entretiens Eric Corne / Patricia Dorfmann – Paris le 30 octobre 2011
Patricia Dorfmann
Night Studio est ta prochaine exposition à la galerie (notre 3ème collaboration).
Tu as choisi de rendre hommage à Eugène Leroy, pourquoi ?
Eric Corne
J’ai une grande admiration pour cet artiste, il m’a montré les possibles de la peinture, sa forme et sa sensibilité. C’est aussi le centenaire de sa naissance, c’est une manière de lui rendre hommage et de le remercier.
P.D.
Quelle relation entretiens-tu avec Eugène Leroy ?
E.C.
Dans les années 80, quand j’étais aux beaux-arts de Tourcoing, nous étions à ce moment-là dans un désert de peinture, et je crois que c’est en allant dans l’atelier d’Eugène Leroy à Wasquehal que mon obstination dans la peinture s’est formulée, tant dans les discussions que nous avons eues que face à son oeuvre. Depuis, elle ne m’a pas quitté. En tant que commissaire, je l’ai exposée au Plateau, au musée Berardo, à Varsovie, au Brésil et ainsi j’ai encore plus plongé dans sa peinture. Il est pour moi avec Edvard Munch, Otto Dix, Felix Nussbaum, Alberto da Veiga Guignard, Philip Guston, Andrew Wyeth, Francis Bacon et bien sûr Picasso et Matisse, mes figures tutélaires de la peinture dans cette période entre expressionnisme et réalisme. Et plus près de nous, Neo Rauch, Paola Rego,
Bernhard Martin et bien d’autres encore, mais aussi David Lynch dans l’ensemble de son oeuvre.
P.D.
Qu’est-ce qui te fascine chez Eugène Leroy ?
E.C.
C’est la question de la lumière et de la densité de la peinture où comment il a su rendre par la matérialité de la peinture, l’immatérialité et l’immanence. Voir une peinture d’Eugène Leroy, c’est en faire l’expérience comme pour Rothko. On n'y voit rien au premier abord et peu à peu un monde insoupçonné se découvre qui ne se limite pas d’ailleurs aux figures qu’on peut percevoir.
P.D.
Ne trouves-tu pas que la peinture d’Eugène Leroy est physique voir sensuelle ?
E.C.
Il y a une émotion toujours renouvelée du corps, de vouloir saisir la vie. Il y a de la sensualité dans ses oeuvres.
P.D.
Est-ce que tu te sens proche de cet aspect ?
E.C.
La dimension sensuelle est importante dans ma peinture. C’est vrai que j’essaie de retenir l’intensité de l’amour physique qui est un point de l’indicible, de l’intime. Il y a toujours dans mes toiles, un monde près de l’écroulement, à la dérive où des récits se croisent. Une tension de récits contradictoires entre la ruine, la violence, le danger, la séparation et cette énergie sexuelle où se mêle le désespoir et l’espoir. Le nu est toujours en effraction avec le paysage.
Ce dernier l’abrite, mais ne fait pas corps avec lui.
La figure humaine séparée de ses vêtements devient aussi intemporelle que les paysages.
Eugène Leroy a réussi cette fusion colorée ou la peinture devient elle-même paysage et embrasse les corps.
La visée impossible du tableau est de nous convertir de voyeur (car on ne peut se convaincre que les « choses » nous regardent) en être regardé. Les scènes d’amour nous mettent en position de voyeur et c’est cette tension que je cherche entre ce moment fulgurant et ce temps plus long que nécessite le pèlerinage de l’oeil pour entrer dans la peinture, pour y trouver sa propre émotion. Les scènes d’amour seraient comme un sphinx qui interdit l’entrée dans le
tableau. L’artiste, le peintre est toujours un metteur en scène, il recherche une coïncidence entre ses images mentales faites de mémoire et d’amnésie et celles du monde extérieur. Se découvre ainsi un monde passé, présent et futur où toute logique est absente à l’image du monde inintelligible dans lequel nous évoluons.
P.D.
Dans ta peinture, les scènes, les couleurs se côtoient apparemment sans relation ?
E.C.
Je cherche l’éblouissement ou une sorte d’aveuglement, c’est pour cela que dans certaines peintures, les couleurs sont très vives ou alors ce sont de scènes nocturnes, un monde d’ombres où le soleil se tait.
P.D.
Quelles sont tes inspirations qui reviennent le plus ?
E.L.
Mes nombreux voyages, et particulièrement ceux au Brésil, m’ont complètement envahi. C’est sûrement ces territoires aux émotions complexes que j’essaie de retenir.
P.D.
Ton oeuvre me semble proche de la littérature aussi.
E.L.
Si elle se nourrit de beaucoup de peintures comme je l’ai dit au début, je lis beaucoup, c’est évident que cela réapparaît. Mes tableaux sont comme des poèmes. Je me sens très proche de la poésie de E.E.Cummings. Chez lui aussi, l’amour structure sa poésie.
P.D.
J’ai aussi envie de te parler de musique ?
E.L
La musique, c’est vrai, j’écoute beaucoup de musique rock et punk aussi. Cette violence et cette déstructuration sont importantes pour moi. J’y puise mon énergie. La musique crée un espace autour de moi. Important aussi le Liebestod de Wagner.
P.D.
Tu fais aussi des vidéos ?
E.C.
Je crois que je travaille comme un peintre avec mes vidéos dans lesquelles je superpose des moments en images mouvement.
P.D.
Comment t’inscris-tu dans le champ contemporain aujourd’hui ?
E.C.
J’ai de la chance aujourd’hui d’avoir de nombreux amis artistes particulièrement dans la jeune génération avec qui je suis en harmonie. Nous nous soutenons et comprenons mutuellement notre travail. Ces échanges sont fondamentaux pour moi.
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Éric Corne, Paysages à la découpe
par Guy Tortosa
« Ce que signifiait jadis l’Être se dresse d’ores et déjà comme une chapelle entre des gratte-ciel, ou comme une preuve de l’existence de Dieu au milieu d’un listing informatique » Peter Sloterdijk, Essai d’intoxication volontaire (1)
L’exposition commence par une vidéo de l’effondrement d’une barre dans la banlieue parisienne de l’autre côté de la tranchée ou de la saignée du périphérique. Cela se passe à Ivry-sur-Seine, scénario en temps réel de la chute du mur, répétition du film de l’histoire sur l’écran du réel : la barre, le mur ; effondrement des espoirs, de l’élévation, des hiérarchies, de la verticalité; mise en tas et non plus seulement « à plat » de l’« Être », de la pensée, du tableau, de l’architecture, de tout le projet moderne ; essai d’une contre-forme, d’une post-forme, de la contre-réforme de la modernité, essai de déformation, de déconstruction de la postmodernité, par la poussière.
Déjà, des terrassements ont eu lieu : « Christ mort » (Holbein, Mantegna), « Jockey blessé » (Degas), etc. « Histoire de l’œil », histoires d’éternels retours. Faibles rayons de savoir dans la salle de projection du corps. Ici le seuil, le lieu, la ville, le prétendu accès au logement du corps comme de l’esprit a été mis en tas, en flaque, en vacarme, en fumées. Le support, la surface, le socle, le tableau ont pu s’imaginer eux-mêmes comme ça, comme tas, en hommage à d’autres œuvres, de Serra, de Smithson, d’Heizer, de Matta-Clark, d’Haus-Rucker-Co, de Sarkis, de Ruthenbeck ou de Gasiorowski: tentatives pour voir si « quelque chose », un « nouveau monde », pourrait sortir de « rien ». (2)
À gauche comme à droite, la catastrophe a eu lieu, elle a presque été fêtée, elle fascine, elle rapporte, elle fait l’objet de toutes les attentions de la part des marchands d’art, d’armes et de sommeil. « Esthétique du chaos », politique du pire, élévation (creusement) des « ruines à l’envers » (3). « Le Futur est obsolète » (4). La marge n’existe plus, annulée dans son état d’idéal mensonge : l’horizon, la banlieue, la périphérie, l’avant-garde. Retour au centre, au palais, au « centre vide » (Barthes, Smithson). Salut nazi (Anselm Kiefer)(5). Re(con)naissance du danger. Big Bang.
Paroles de Pierrot le fou, épitaphe du Corbusier. Corps bu noyé dans la Mare. « Tombe » : histoire de chu(chot)te(r):
« Elle est retrouvée !
Quoi ? L’éternité.
C’est la mer mêlée
Au soleil » (6)
Voila… Présent, le visiteur passe, déjà il est « passé » par le livre, par la citation, par la vidéo, par le souvenir (7). Étranges mots de « ville » et de « vidéo ». Incontournable, la convention : la fenêtre, le tableau. « Voyant », révolté, assassiné ou simplement né (né assassin), le poète s’en est allé, emporté, terrassé aussi, comme nous à présent, non pas du dérèglement de tous ses sens, mais d’avoir « succombé » au luxe, à la propagande, de n’avoir pas v(oul)u (voir) les fusils et les bombes toujours si nombreux derrière les rêves…
« Enfin, Ô bonheur, Ô raison, j’écartais du ciel l’azur qui est du noir » (8). L’exposition peut reprendre, l’histoire se répéter, le soleil se lever dans les couleurs des fumées d’usines (Antonioni, Désert rouge) et le tourniquet du présent. Hallucination. Beauté effrayante du réel impensable, incroyable. Bosch, Goya, Munch, Pasolini, Gitaï : « pas de possibilité de rencontre (…) pas même une rencontre de caractère moralement négatif, dramatique, scandaleux, comme celui qui existe entre quelqu’un qui achète un être humain et celui qui est acheté !» (9)
Elle est retrouvée, quoi? La peinture, c’est la couleur mêlée à la lumière. La peinture, le soleil et les oiseaux, de nouveau tout entier à leur révolution. Paysages politiques, paysages composés, natures à moitié mortes. (Re)constructions, tableaux didactiques, ex-voto, « beats », « trips » : (re)présentations de champs, de forêts, de cultures. Silence d’avant les tempêtes. « On ne voyage pas ». Mirages de la prospérité, du désert (Oman, Bahreïn, Qatar, etc.). Après les bombes, le Roundup®, après les champs, le « blé », après le pétrole, les gratte-ciel, après l’eau, les fontaines, les piscines. Bacs à sable, « orgasmes sexuels monstrueux» (10) : fontaines, climatisations, silos à grain, billets « verts ». « Peut-on s’extasier dans la destruction, se rajeunir par la cruauté ! » (11). Retour au passé via les tours, les « barrages » et les pylônes qui transportent l’énergie transformée des rivières pour éclairer des lotissements et des « barres » dont les habitants parfois devenus SDF ne se souviennent plus du temps où, avant d’être soldats, ouvriers et chômeurs, avant d’échouer sur les champs de bataille des nouvelles « campagnes » électorales, déjà pauvres, ils étaient pay(s)sans.
Fini les catégories, fini les différences entre le centre et la périphérie, le rêve et le cauchemar, la « nature morte » et le « paysage ». Paysages postmodernes, transgenres, composés, paysages hallucinés, Vista®, politiques, paysages à la découpe. Définition même du paysage : un objet et un sujet, du réel et de la représentation, un magasin de marchandises (12), un tableau dans lequel on est déjà avec le corps et par l’esprit: l’oeuvre (d’art) totale, (répétition) générale, (Euro)land, earth(work), la cité-jardin (planétaire), le foutoir.
Emballement de la mémoire. Hypermnésie. Superposition. Del, coupé, collé. « Tout va bien ». Comme dans un film de Charles Laughton, de Robert Smithson, de Philippe Parreno et de Rirkrit Tiravanija (13), comme dans un tableau de Fra Angelico, du Douanier Rousseau ou de David Hockney, comme dans un poème de Boris Vian, de Jacques Prévert ou de George Perec, comme dans une photographie de Claire Chevrier ou de Massimo Vitali : un oiseau, une décharge, une maison, un lapin, « un bel aérateur », des baigneurs, « un avion pour deux » (14), « quatre fossoyeurs » (15), une centrale nucléaire, une bibliothèque , des « fiches-cuisine » (16) des montagnes, une croix gammée, un prêtre, un miracle…
Impression soleil couchant : on touche à l’« essence »… Images pour une religion laïque et progressiste, cyniquement modifiée. Religion quand même. Congestion paisible de la postmodernité. État des choses. All over (17) ou overdose (Janis Joplin). Extase ou catastrophe. Corps-texte planétaire. Au-delà des limites : «Sublime, forcément sublime » : « que le monde aille à sa perte, c’est la seule politique » (18). La vérité, c’est qu’entre Peter Sloterdijk et Pasolini, entre le nihilisme optimiste de l’« Essai d’intoxication volontaire » et l’humanisme pessimiste de « L’article des lucioles » dans lequel l’auteur de Salo fait coïncider la montée du « fascisme démocrate-chrétien » avec l’apparition de la pollution atmosphérique (et la « disparition des lucioles »), celui qui recopie les pages des journaux d’« actualité » et qui ne se lasse pas de recopier de même les « détails » de l’art, catastrophique et beau, qu’on nomme la peinture (Church, Bonnard, Bacon, Morley, etc.), ne peut pas choisir. C’est sa condition. C’est la mienne aussi.
Alfortville, lundi 26 mars 2007
1. Peter Sloterdijk, « Sur l’interprétation philosophique de l’artificiel », Essai d’intoxication volontaire, Hachette littératures, coll. Pluriel, 2001, pp. 223 à 234.
2. Peter Sloterdijk, op.cit
3. Robert Smithson, « Une visite aux monuments de Passaic, New Jersey », catalogue de l’exposition Robert Smithson, le paysage entropique, 1960/1973, Musées de Marseille/RMN, 1994, pp. 180 à 183
4. Robert Smithson, op. cit
5. Anselm Kiefer, Besetzungen (Occupations), 1969 : « La première exposition de Kiefer consiste en une série de photographies de lui en culottes et bottes nazies, en train de faire le salut Sieg Heil sur différents sites européens (…) en référence au peintre romantique Caspar David Friedrich ; mais Kiefer a substitué au promeneur en contemplation mystique devant la mer de nuages un nazi absurde et solitaire, comme lui vu de dos. », extrait de « Der Holzweg, la traque à travers bois », Simon Schama, Le Paysage et la mémoire, Paris, Seuil, 1999, pp. 142 à 143.
6. Arthur Rimbaud, « Une saison en enfer », Une saison en enfer, in Poésies, Poésie/Gallimard, p.144
7. sur l’homonymie ou synonymie entre « passé » et « passer » mais aussi entre « passages » et « fragments », (re)lire Paris, capitale du XIXème siècle, Le Livre des passages de Walter Benjamin en songeant à la place que, dans ce chef-d’oeuvre (in)achevé, l’auteur donne involontairement à la question du passage comme « fragment »…
8. Arthur Rimbaud, op. cit.
9. Pier Paolo Pasolini, « Note 41, Achat d’un esclave », Pétrole, Gallimard, collection NRF, 1995, p. 178
10. Robert Smithson, op. cit.
11. Arthur Rimabud, « Contes », Illuminations, in Poésies, Poésie/Gallimard, p.160
12. Roland Barthes, « Le monde-objet », Essais critiques, Points Seuil, Essais, pp. 22 à 31, 1964 : « Voyez la nature morte hollandaise : l’objet n’est jamais seul, et jamais privilégié ; il est là, et c’est tout, au milieu de beaucoup d’autres, peint entre deux usages, faisant partie du désordre des mouvements qui l’ont saisi, puis rejeté, en un mot utilisé. » (op. cit. p.23)
13. Philippe Parreno & Rirkrit Tiravanija, Stories are Propaganda, film/installation, galerie Air de Paris, Paris, 2006
14. Boris Vian, « La Complainte du progrès », 1955 : « Un frigidaire // Un joli scooter // Un atomixer // Et du Dunlopillo // Une cuisinière // Avec un four en verre // Des tas de couverts // Et des pell' à gâteaux // Une tourniquette // Pour fair' la vinaigrette // Un bel aérateur // Pour bouffer les odeurs // Des draps qui chauffent // Un pistolet à gaufres // Un avion pour deux // Et nous serons heureux…. »
15. Jacques Prévert, « Inventaire », Paroles, Œuvres complètes, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 1992, p.131 : « Une pierre // deux maisons // trois ruines // quatre fossoyeurs // un jardin des fleurs »
16. Georges Perec, Penser/classer, Hachette, Paris, 1985
17. Pour rappel : avec des oeuvres comme Asphalt rundown (Rome, 1969), Robert Smithson instruit une critique puissante de la dimension narcissique et marchande de l’abstraction lyrique au profit de la prise en compte de l’environnement comme sujet et autre critique globalement ignorés par le système de la mode et du marché. support d’un « autre » art et d’une
18. Marguerite Duras, Le Camion, Éditions de Minuit, Paris, 1977, p. 25